Mon pull et moi

Si je dis 'mon pull et moi', moi venant après mon pull, ce n'est pas tant par politesse que pour respecter un ordre de préséance. Car mon pull est mon supérieur et je suis, en quelque sorte son porteur. Lorsque des amis viennent me voir, c'est lui qui immédiatement capte l'attention, attire les regards et c'est à lui qu'ils s'adressent lorsqu'ils commencent à me parler.

Si je voulais le décrire, il me faudrait dire que c'est un pull qui est vaste sans être difforme, qui est chaud mais que l'on peut porter en intérieur (quand je dis 'on' c'est de moi qu'il s'agit bien entendu), un pull dans lequel on se sent à l'aise sans pour autant pouvoir prétendre à être élégant. Sa couleur est violet sombre et peut faire penser à la couleur des mers vineuses décrites par Homère.

En écrivant 'mon pull', j'ai l'impression d'avoir commis un abus de langage. Car, ce pull, je ne l'ai pas acquis : il m'a été offert. En cadeau. D'anniversaire je crois bien. Aussi bizarre que ça puisse paraitre, ce pull vaste, chaud, de la couleur vineuse des mers décrites par Homère, et qui est mon supérieur, est un cadeau d'anniversaire.

En première impression, je j'ai déjà dit, il attire l'oeil. C'est la raison pour laquelle longtemps je ne l'ai pas porté. Mais petit à petit, comme l'oiseau fait son nid, il a pris sa place et si aujourd'hui je le porte avec plaisir, respect et fieté c'est que j'ai conscience qu'il ne s'agit pas là d'un pull ordinaire ; il s'agit en quelque sorte DU pull par excellence.
Un platonicien reconnaitrait, en le voyant, l'archétype du pull. Un freudien parlerait du 'ça pull' mais c'est sans doute un nietzschéen qui serait le plus proche de la vérité en lui décernant immédiatement le titre de 'Sur-Pull'.