La pluralité des mondes (3)

Emmanuel Kant, qu'on ne s'attend pas à voir discourir sur les petits hommes verts a pourtant écrit "Une tentative fondée sur l'analogie de la nature pour effectuer une comparaison entre les habitants des différents corps planétaires."

Il y défend l'existence d'un rapport entre la matière constitutive des habitants et leur capacité à réfléchir :
"La perfection des créatures dotées de raison, dans la mesure où elle dépend de la qualité de la matière qui les constitue et les limite, est plutôt fonction de la finesse de cette matière qui les influence et les détermine dans leur perception du monde et leur réaction à celui-ci. L'inertie et la résistance de la matière limite considérablement la liberté de l'être spirituel dans son action et dans l'acuité de sa perception des choses extérieures."

Kepler, pour sa part, considérait que la Lune était non seulement habitable mais réellement habitée. Il affirma que "lorsque les choses sont en ordre, si la cause de cet ordre ne peut être déduite ni du mouvement des éléments, ni de la composition de la matière, cette cause est très probablement nantie d'un esprit." Il conclut sur la base d'observation que sur la Lune "la forme parfaitement ronde des creux ainsi que leur disposition prouvent qu'ils sont artificiels et produits par un esprit d'architecte" et donc qu'il devait y avoir des créatures vivantes sur la Lune capables de raisonner pour réaliser ces constructions ordonnées.

Evidemment il est maintenant facile de voir que l'ordre perçu par Kepler avait son origine non pas dans des cerveaux extra-terrestres mais plutôt dans celui de l'observateur. Kepler imposait un ordre là où il n'y en avait pas, parce qu'il n'était pas à même de comprendre la cause naturelle de l'ordre apparent.

Cette erreur est pour ainsi dire assez classique dans l'histoire de la science. On la retrouve par exemple lorsque Percival Lowelle crut découvrir, en 1905, des canaux sur Mars.